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     Le fiancé de la princesse

    D'après le recueil
     « En ramassant des feuilles de l'arbre Bodhi »
     

     

     

    Il était une fois un petit royaume

    où régnait un vieux roi respecté de ses sujets.

    Il n'avait pas de prince héritier et voulait chercher un fiancé

     pour sa fille de dix ans.

    Il fit sélectionner un certain nombre d'adolescents,

    plus doués les uns que les autres,

     les réunit dans son palais et remit à chacun d'eux un sachet de graines.

     

    L'année suivante, au jour fixé,

     tous les garçons apportèrent au palais les fleurs

    qu'ils avaient consciencieusement cultivées.

    Dans la grande salle du trône parfumée de verdure,

     les plantes étaient magnifiques et les fleurs superbes.

    Le roi et la reine passèrent lentement en revue les rangées de pots,

    la mine grave et soucieuse.

    Soudain ils s'arrêtèrent devant un adolescent triste et timoré,

     qui avait les larmes aux yeux.

    — Vos Majestés, dit-il, je ne comprends pas ce qui est arrivé.

     J'ai demandé autour de moi de la meilleure terre et des meilleurs engrais,

    j'ai suivi tous les bons conseils,

    j'ai pris le plus grand soin de vos graines,

    hélas rien n'a poussé.

     Je suis honteux d'avoir échoué,

     je suis venu seulement pour ne pas jeter le déshonneur sur ma famille

    et sur mon village.

    Le roi lui annonça gentiment :

    — C'est toi le fiancé de la princesse.

    Des murmures de surprise,

    de déception voire même de désapprobation, parcoururent la foule,

     mais personne n'osa contester la sentence royale.

    Depuis ce jour le petit garçon vécut au palais

     où il reçut l'éducation d'un prince héritier.

    Puis il monta sur le trône et régna longtemps.

    Au soir de leur vie,

     la princesse qui était devenue reine lui dévoila enfin le choix de ses parents :

    — Avant de mettre les graines en sachets, ma mère les avait cuites à la vapeur.

    Pour réussir les autres garçons avaient réparé ce qu'ils croyaient être

    un coupdu sort ou une erreur humaine.

    Ils étaient certainement malins et débrouillards,

     ils avaient même le sens de l'initiative,

    ou on les avait trop bien aidés.

    Mais ils n'avaient pas deviné le problème de mon père :

    par cette épreuve il voulait trouver un fils honnête,

    en qui il pourrait mettre toute sa confiance, ni plus ni moins.

    Ensuite il aurait tout le loisir de le former,

     pour en faire un prince puis un roi.

    Le vieux roi soupira :

    — Nos parents étaient bien étranges,

    j'ai été choisi parce que j'ai bien répondu à la question,

    alors que je n'avais nulle conscience de l'existence de cette question.

    C'était donc un coup de dé !

    La reine le rassura doucement :

    — Ne te tracasse pas vainement,

    à leurs yeux tu étais le plus digne de tous

    et jamais ils n'ont eu de doute à ton sujet.

    Le zen c'est cela, mystérieux et ordinaire.

    De tous temps,

     il existe sûrement une prime à la vérité et à la sincérité.

     

      
      
      
      
      
      
      
    Thich Thanh Tu

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    Le conte de la petite autruche si courageuse...

    « Le conte de la petite autruche si courageuse,

     qu'elle mettait toujours sa vie en danger »

     

      Entre boulimie et anorexie,

    tenter d'exister tenacement, pathétiquement,

     pour dire et ne pas dire l'insupportable.

     

     

      Il était une fois une petite fille d'autruche

    qui pendant des années refusa de manger.

     Elle était devenue comme on dit dans le langage des autruches,

     qui est très particulier : anorexique.

    Il faut que je vous dise qu'elle maltraitait son corps

     avec un acharnement incroyable.

    Elle pesait la moitié de son poids normal et ses parents,

     sa mère en particulier, envisageaient de l'hospitaliser.

     Cela se fit d'ailleurs dans des conditions douloureuses

    pour chacun des parents et surtout pour la petite autruche

    qui hurlait dans son corps ce qu'elle ne pouvait dire autrement.

    Elle criait avec des maux ce qu'elle ne pouvait exprimer avec des mots.

     Et pourtant il y avait plein de mots en elle,

    qu'elle devait avaler, ravaler sans cesse.

     Ce sont tous ces mots-là qui la nourrissaient avec une rage terrible.

    A force de les remâcher, de les ruminer en elle,

    cela la remplissait sans qu'elle ait besoin de manger.

     A la sortie de la clinique (très chère, ou très chair !)

    la petite autruche inversa sa tactique, elle se mit à manger,

    à manger de tout, à tout instant, avec plein de dégoût et de colère en elle.

     Ensuite, elle allait dans un coin et vomissait,

    rejetait tout ce qu'elle avait avalé avec tant de violence contre elle-même.

    On appelle cela, dans le langage des autruches, de la boulimie.

    Tout se passait comme si elle voulait absorber toutes les paroles de sa mère.

     Ah oui, vous ne suivez plus ?

    Cela vous paraît trop compliqué !

     C'est vrai que j'ai oublié de vous dire que sa mère parlait beaucoup,

     vraiment beaucoup trop, sans arrêt.

    Elle avait une explication pour tout.

    Elle vivait des choses terribles dans son couple,

    de nombreuses frustrations, des ressentiments, des humiliations,

     qu'elle ne voulait éviter,

     et dont elle ne pouvait se plaindre car elle était attachée à cette relation.

    Cela se passe parfois ainsi chez les autruches,

    on croit qu'elles se cachent la tête dans le sable pour ne pas voir ni entendre,

    mais c'est aussi pour ne pas dire.

     Pour ne pas dire l'essentiel.

      Une autre des techniques,

    parmi les plus pratiquées chez les autruches,

     c'est de parler pour ne rien dire, pour mettre des mots en écran,

    pour créer une sorte de brouillage avec leur propre ressenti.

    Car si elles entendaient leurs ressentis cela deviendrait vite insupportable,

    inacceptable pour elles.

       Vous comprendrez donc le double conflit qu'avait la petite autruche

    avec elle-même et avec sa mère.

    Je vais tenter de le dire plus clairement.

          Dans la phase anorexie, pour parler comme les autruches,

    tout se passait comme si la petite rejetait comme pas bon

     ce qui lui venait de sa mère,

    tout en essayant d'attirer et de capter inlassablement son attention.

      Comme si elle disait en se privant :

     Arrête, arrête de parler sur moi sans cesse, arrête,

     tu vois bien que je refuse,

     que je rejette tout ce qui vient de toi parce que ce n'est pas réellement toi !

     Vous comprenez mieux maintenant !

      Et puis dans la phase boulimie, c'est comme si elle disait :

    Je vais avaler tout ce qui vient de toi,

     je vais tenter de te débarrasser, maman,

    detous ces mots qui t'encombrent.

    Comme cela tu pourras enfin un jour dire l'essentiel,

     le plus important pour toi.

     Comme vous le voyez,

    c'est une situation qui semble sans issue, sans fin,

     je veux dire sans faim.

     Vous comprenez mieux maintenant le courage,

     la détermination de cette petite autruche,

     qui prenait ainsi le risque de maltraiter son corps en essayant

    pathétiquement, tenacement, de dire à sa mère :

     Je te montre, maman, dans mon corps,

     la façon dont, toi, tu maltraites ta vie,

    comment tu acceptes de ne pas être respectée.

    Je te le montre par tous les moyens,

    pour ne pas être amenée un jour à faire comme toi !  

     Nous pouvons entendre que ce qui paraît être au premier regard

    comme une automaltraitance,

    une autodestruction de la part de la petite autruche,

     était enfait une façon extraordinairement courageuse de résister,

     de faire face, de ne pas mettre sa tête dans le sable

    comme le font beaucoup de ses semblables.

    Il serait trop long de démêler les enchevêtrements complexes

     qu'il peuty avoir entre une petite autruche et sa mère,

    et puis je ne suis pas là pour faire de la psychologie.

    Toute cette histoire est seulement un conte.

    Des situations comme celles-ci ne se passent d'ailleurs

    qu'au pays des autruches.

    Et ne croyez pas non plus que je souhaite mettre la maman autruche

    en accusation.

    Cette femme, au-delà de ses aveuglements,

     affronte également sa propre souffrance

     autour des situations inachevées de sa propre histoire.

    Nous voyons qu'il s'agit d'un système très complexe

    où une enfant prend sur elle pour témoigner,

    jusqu'à sa propre destruction,

    d'un conflit perçu chez sa mère, 

    pour tenter pathétiquement de l'en débarrasser.

     Mais, ce faisant,

    elle va paradoxalement paralyser cette mère,

     qui va se mobiliser entièrement autour de l'anorexie ou de la boulimie

    de son enfant, sans pouvoir s'occuper d'elle,

    tellement sera angoissant ce retour sur elle-même.

    C'est ainsi que cela se passe parfois au pays des autruches.  

     Je ne sais si ce conte parviendra un jour à cette petite autruche.

     

      

      
      
      
      
    Jacques Salomé :
     Contes à aimer, contes à s'aimer”

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    Certaines et d'autres.

     

     

    Il était une fois vingt-deux petites étoiles

    qui s'étaient rendues à un congrès d'étoiles.

    Ce congrès avait pour thème :

    “Comment comprendre une autre étoile en se comprenant mieux soi-même.”

    Car il faut vous dire que les étoiles vivent tellement éloignées

     les unes des autres qu'il leur est difficile de se rencontrer

    et encore plus de se comprendre.

    Ce congrès était animé par une étoile proche de la Planète TERRE,

     qui avait beaucoup travaillé sur elle.


    Les petites étoiles étaient toutes très excitées à l'idée qu'en buvant

    quelques gorgées d'un philtre magique,

    pas plus de trois, elles pourraient à leur tour savoir communiquer.

    Certaines venaient confiantes,

    d'autres méfiantes et d'autres déjà tout acquises.

    En arrivant au premier matin sur les lieux du congrès,

     les petites étoiles se tenaient bien à distance les unes des autres.

    Car elles avaient appris dans leur enfance que si une étoile

    touchait une autreétoile,

    une grande catastrophe pouvait se déclencher.


    Quel genre de catastrophe, elles ne le savaient pas,

     mais cela pouvait être aussi térrible que de perdre son identité,

     que de s'éteindre, de disparaître dans le noir de l'espace.

    Alors bien sagement,

     elles rentraient leurs genoux et se tenaient bien droites.

     Il y en avait bien quelques-unes,

     celles qui étaient déjà acquises,

     qui avaient l'air détendues,

    qui parlaient de “rebirth”, de “partage de sentiments”,

     de “ressentis”, de “tripes nouées” aussi,

    mais cela restait encore incompréhensible

     pour la plupart des autres petites étoiles.

    Et puis le gourou arriva !

    Il offrit quelques sourires aux méfiantes,

     quelques regards aux confiantes

    et quelques paroles relationnelles à celles qui étaient déjà conquises...

    Et le congrès commença.

    Oh ! Stupeur, pas de philtre magique, pas de recettes !

    Les petites étoiles qui étaient venues avec leur récipient

    pour recueillir ce philtre se demandaient

    si elles ne s'étaient pas trompées de congrès.

    De plus, non seulement il n'y avait pas de philtre magique,

     mais à la surprise générale,

     ce n'était pas le gourou qui parlait le plus !

    C'étaient les petites étoiles !

    Certaines parlaient d'elles-mêmes,

    d'autres avaient besoin d'être un peu sollicitées,

     d'autres encore avaient besoin d'être poussées,

    pour aller plus loin dans leur propre lumière.

    Mais finalement toutes parlèrent.

    Les petites étoiles furent surprises, touchées, émues,

     émerveillées, tristes, heureuses,

    blessées d'entendre toutes ces histoires venues des autres

     constellations qui de loin leur paraissaient si menaçantes ou si inconnues :

    Divorce, Parents, Papa, Maman, Suicide, Amour, Haine, Filiation, Beauté,

     Laideur, Règles, Incompréhension, Tendresse, Femme, Peinture, Mort,

    Maladie, Œdipe, Mari, Araignée, Violence, Douceur, Peur, Enfant... Désir.

    Sans paraître même les avoir écoutées,

     le gourou amplifia certains mots,

     relia, prolongea la parole de chacun.

    Il apparut que toutes ces histoires venues de constellations aussi lointaines,

     aussi différentes, avaient toutes quelque chose en commun.

    Les petites étoiles furent sidérées.

    Elles ne s'étaient jamais rencontrées

    et toutes leurs histoires avaient des points communs !

    Mais lesquels ?

    Le gourou paraissait accablé par une telle incompréhension.

    Cela faisait des années qu'il répandait les rires de la connaissance

    à travers la galaxie.

    Il lui semblait que sa tâche ne finirait jamais.

    Même des étoiles qui avaient lu et même parfois bu ses paroles

    ne percevaient pas que ce qu'il y avait de commun dans l'univers

    de chaque étoile s'appelaitla relation.

    Fallait-il désespérer ?

    Les petites étoiles, elles, ne désespéraient pas,

     car chacune avait découvert qu'une petite étoile peut :

    regarder une autre étoile sans devenir aveugle,

    toucher une autre étoile sans devenir manchotte,

    se dévoiler à une autre étoile sans être condamnée,

    chacune avait compris que la tendresse est comme l'oxygène,

     qu'il y en a partout dans la Galaxie des relations

    et la Voie lactée de la communication...

    Elles découvrirent bien d'autres choses encore,

    qui appartiennent à l'intimité de chaque petite étoile.

    Ainsi avançait le congrès.

    Le temps allait venir où il faudrait quitter cet endroit si bien nommé

    “Le Remous”,

    car des remous il y en avait eu.

    Certains remous s'étaient même transformés en trou noir,

     d'autres en tempêtes de météorites

    et d'autres encore en Voie lactée infinie et calme.

    Les étoiles étaient bien tristes,

     car il leur fallut retourner vers leur constellation d'origine

    et retrouver d'autres étoiles qui, elles,

    n'avaient pas vécu tout cela !

    Alors pour se donner du courage,

     elles se promirent de garder le contact,

    de s'envoyer des clins d'oeil d'étoiles,

    des rires de lumières et surtout de se respecter !

    De toutes ces découvertes, chacune dans sa vie fit un usage différent.

    Certaines les gardèrent secrètes au fond de leurs entrailles

    ou de leurs pensées,

    d'autres préférèrent les oublier,

     d'autres encore émirent quelques messages dans l'éther intersidéral...

    et la plupart les partagèrent pour donner plus de vivance à leur vie.

    Toutes savaient qu'il est possible de communiquer au-delà des murs de silence,

     bien au-delà de l'opacité des peurs.

    Au-delà aussi des incompréhensions et des violences aveugles.

    J'allais oublier de vous dire le plus curieux.

    A la fin de la rencontre,

    elles découvrirent que le gourou des étoiles n'en était pas un.

    Qu'il était simplement un animateur de rencontres.

    Elles apprirent qu'animer cela veut dire :

    “Maintenir la vie vivante”.

      

      
      
      
      
    Jacques Salomé :
     Contes à aimer, contes à s'aimer”

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    Le conte du petit garçon

     

    Il était une fois un petit garçon qui savait comme ça,

    de naissance, sans que personne le lui ait dit,

    qu'il y avait une sorcière très méchante,

     très colérique et même horrible à l'intérieur de sa maman.

     Mais cette sorcière ne lui faisait pas peur car il aimait beaucoup sa maman.

    C'était vraiment un petit garçon formidable, génial.

    Il connaissait par exemple plein de trucs pour réveiller la sorcière,

     la faire sortir de sa mère qui se mettait alors à hurler,

     à taper sur tout ce qui était à sa portée,

     à casser plein de choses dans la maison,

    puis à s'enfermer dans sa chambre en claquant la porte...

    pour pleurer derrière, toute seule.

    Va-t-en, lui criait-elle,

    quand il s'approchait pour la consoler,

     va-t-en, je n'ai pas besoin de toi.

    Et pourtant,

    cette femme adorait son enfant.

     Elle débordait de tendresse pour lui,

    se sentait responsable de tout ce qui arrivait à son fils.

    Et lui aussi, je l'ai déjà dit, adorait sa mère,

    se montrait très souvent gentil,

    serviable et tendre avec elle.

    Mais à certains moments, ça recommençait.

    Il connaissait plein de moyens pour irriter sa maman,

     faire sortir la sorcière.

     Comme par exemple de se coucher à moitié sur la table pendant les repas.

    Tiens-toi droit pour manger, arrête de te vautrer à table...

    Et lui, il faisait le sourd, se couchait encore un peu plus,

    tordait sa bouche, trempait sa manche dans l'assiette.

    Alors là, ça débordait... chez la mère.

    C'est insupportable, mais qu'est-ce que j'ai fait au Bon Dieu

    pour mériter un enfant comme celui-là !

    Et les cris, les reproches,

    les accusations tombaient sur sa tête, avec des coups souvent.

    Il faut savoir que ce petit garçon avait été attendu, désiré,

    espéré par sa mère et par son père.

     Il avait été conçu dans le plaisir,

     il y avait de cela six ans et neuf mois en plus

    (il faut toujours compter les mois passés dans le ventre !).

    Ainsi s'écoulèrent les années.

     Ce garçon connaissait vraiment plein de façon pour déclencher la colère

    de la sorcière qui était à l'intérieur de sa maman.

    Des petits riens de rien du tout,

     mais qui faisaient un effet terrible sur sa mère.

     Par exemple,

    il savait ne pas se laver le matin et s'arrangeait

    pour que sa mère le découvre juste au moment de partir en classe...

    drame-coups-cris-pleurs, etc.

    Il savait aussi prendre l'air absent comme s'il n'était pas là.

    Il partait très loin,

     mettait les doigts dans son nez ou encore,

     avec un vieux crayon, il dessinait sur les murs du salon,

    découpait des journaux entiers en petits morceaux...

    Ca alors,

     ça déclenchait la sorcière qu'il y avait dans la mère.

    Elle hurlait :

    Mais qu'est-ce que tu as, sale môme, qu'est-ce que tu as dans la tête !

    Elle croyait évidemment que cela se passait dans la tête.

    Ce qu'elle ne disait pas,

    c'est qu'il y avait en elle une envie folle de lui cogner la tête contre les murs,

    de lui attacher les mains,

    d'aller le perdre dans la forêt comme le Petit Poucet,

    si elle avait osé.

    Elle se sentait parfois capable de tout, mais capable de tout...

    et aussi très coupable.

     Avec des envies de lui tordre les mains, de le secouer,

    de lui crever les yeux.

    Oui, elle imaginait tout cela.

    C'était horrible pour elle,

    toutes ces idées qui lui passaient... par la tête.

    Alors elle faisait son possible pour cacher tout cela,

    pour ne pas montrer toute la violence qu'il y avait dans son corps.

     Elle essayait de comprendre, de discuter, de demander :

    Pourquoi ? Mais pourquoi tu fais tout ça mon chéri,

    disait-elle, pourquoi ?

    Et ces pourquoi sans réponse la mettaient encore plus en colère.

    D'autres fois, comme vous le savez déjà, elle partait dans sa chambre,

    pour se cacher de toutes ses mauvaises pensées.

    Elle revenait les yeux rouges, préparait le repas en silence.

    Mais ces jours-là, ce n'était pas très bon,

    il y avait comme un goût de mauvais dans les assiettes,

    un goût de rancœur...

    Elle avait alors des gestes prudents pendant quelques jours,

    comme si elle craignait de casser son fils...

    ou d'imploser à l'intérieur d'elle.

    Et puis patatrac, tout recommençait.

    Avec sa fourchette, il tapait par exemple sous la table.

     Oh ! pas fort, mais un petit

       bruit régulier, régulier, sans fin...

        INSUPPORTABLE. –TU VAS ARRETER, OUI !

      C'EST PAS POSSIBLE UN ENFANT COMME CA !

    Des fois, il se couchait avec les chaussures... dans le lit,

     ne tirait jamais la chasse d'eau...

    et il déroulait tout le rouleau de papier jusque dans... la cuisine !

       M.... A LA FIN ! criait la mère. OU TU TE CROIS... ?

    Cela durait depuis des années.

    Puis un jour,

    la mère comprit que ce petit garçon qu'elle avait

    était un enfant formidable, plein de ressources,

    et surtout un enfant très aimant, très fidèle.

    Oui, tout s'était passé comme si son enfant avait su depuis toujours

     qu'elle avait été elle-même une enfant trop silencieuse,

    qui n'ouvrait jamais la bouche,

    qui ne contrariait personne.

    Que, toute petite, elle n'avait jamais fait de bruit,

    jamais montré sa tristesse ou sa joie,

    jamais exprimé ses colères ou ses enthousiasmes.

    Et lui, le petit garçon, c'est comme s'il avait entendu tout cela,

    sans que jamais personne en parle.

    Comme s'il disait à sa mère, en faisant des bêtises :

    Mais oui, tu as le droit de crier, tu as le droit, Maman,

    de montrer ta colère, tu n'as jamais pû le faire toute petite...

    Alors moi je le fais pour toi.

    Je t'aide, Maman,

    à mettre au monde toute la violence qu'il y a en toi

     et que tu caches tout au fond de toi,

     depuis tant d'années...

    Ce jour-là,

    elle osa lui parler d'elle, de la petite fille silencieuse, gentille,

    inodore et sans saveur qu'elle avait été.

    Je faisais tout pour ne pas me faire remarquer, dans une pièce,

    c'est au bout d'une heure qu'on découvrait que j'étais là.

    « Tiens, tu es là, toi, on ne t'avait pas vue... »

    Elle parla longuement d'elle à son petit garçon,

    elle lui dit tout ce qu'elle n'avait jamais

     pû dire à personne d'autre.

    Elle sentit les larmes qui envahissaient sa gorge,

    sa bouche, ses yeux, ses oreilles.

     Elle pleura, longtemps, longtemps, dans les bras de son enfant.

     Puis elle le serra contre son cœur...

    et lui dit seulement ceci :

    Merci. Merci, je crois qu'aujourd'hui la vieille sorcière

    qui était en moi est partie pour toujours.

     Grâce à toi, j'ai pû la reconnaître, je peux enfin la laisser aller...

    Ainsi se termine le conte du petit garçon

     qui avait sû réveiller la sorcière si noire,

    si méchante qui dormait depuis si longtemps chez sa mère.

      
      
      
      
    Jacques Salomé
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    L'île des sentiments

     

    Il était une fois une île sur laquelle vivaient tous les sentiments

    et toutes les valeurs humaines :

    la Bonne humeur, la Tristesse, la Sagesse...

    ainsi que tous les autres, y compris l'Amour.

    Un jour, on annonça que l'île allait être submergée.

     Alors tous préparèrent leurs embarcations et s'enfuirent.

    Seul l'Amour resta, attendant jusqu'au dernier moment.

    Quand l'île fut sur le point de disparaître,

     l'Amour décida de demander de l'aide.

    La Richesse passa près de l'Amour dans un bateau luxueux

    et l'Amour lui dit :

    "Richesse, peux-tu m'emmener ?"


    "Je ne le peux pas car j'ai beaucoup d'or et d'argent dans mon bateau

    et il n'y a pas de place pour toi."

    Alors l'Amour décida de demander à l'Orgueil

     qui passait dans un magnifique bateau :

    "Orgueil, je t'en prie, emmène moi."

    "Je ne peux pas t'emmener, Amour,

    tu pourrais détruire la perfection qui règne dans mon bateau."

    Ensuite l'Amour demanda à la tristesse qui passait par là :

    "Tristesse, je t'en prie, emmène moi."

    "Oh Amour" répondit la Tristesse

     "je suis si triste que j'ai besoin de rester seule."

    Ensuite la Bonne humeur  passa devant l'Amour,

    mais elle était si heureuse qu'elle n'entendit pas qu'on l'appelait.

    Soudain une voix dit :

    "Viens, Amour, je t'emmène avec moi."

    C'était un vieillard qui l'avait appelé.

    L'Amour était si heureux et si rempli de joie,

     qu'il en oublia de lui demander son nom.

     Arrivés sur la terre ferme, le vieillard s'en alla.

    L'Amour se rendit compte combien il lui était redevable et demanda au Savoir :

    "Savoir, peux tu me dire qui est celui qui m'a aidé ?"

    "C'est le Temps" répondit le Savoir"

    "Le Temps ?", demanda l'Amour,

     "Pourquoi le Temps m'aurait-t'il aidé ?"

    Le Savoir plein de sagesse répondit :

    "Parce que seul le Temps est capable de comprendre

     combien l'Amour est important dans la vie".

      

      
      
    Auteur inconnu

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